Lors de la session extraordinaire de la Cemac à Yaoundé, le président camerounais Paul Biya a appelé à des efforts collectifs pour surmonter les défis économiques régionaux. Les États membres entendent intensifier les réformes structurelles et réclament des actions concrètes, notamment le rapatriement des devises issues des activités minières et pétrolières.
Une réunion sous le signe de l’urgence économique
Face aux risques croissants de crise économique, la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) a tenu une session extraordinaire le 16 décembre à Yaoundé, au Cameroun. Dans son discours d’ouverture, le président hôte, Paul Biya, a souligné la nécessité d’une « action urgente » pour stabiliser la région, marquée par un contexte économique « préoccupant ».
Le sommet a permis d’identifier des priorités pour éviter une crise financière imminente, en insistant sur des « efforts collectifs et concertés ». Parmi les principaux défis abordés figurent :
• La poursuite des réformes structurelles ;
• La consolidation budgétaire et une politique d’endettement prudente ;
• La gestion des risques dans le secteur bancaire ;
• Le rapatriement des devises liées aux activités minières et pétrolières.
Des indicateurs économiques préoccupants
Dans un communiqué final, la Cemac a reconnu une tendance baissière des réserves de change, malgré une amélioration temporaire depuis 2016 (passant de 2,3 mois à 4,6 mois de couverture des importations en 2023). Toutefois, les perspectives pour les matières premières restent défavorables, un signal alarmant pour une région encore largement dépendante du pétrole.
Les chefs d’État ont rappelé l’importance d’une politique d’endettement maîtrisée et ont appelé les partenaires internationaux à soutenir davantage la transformation structurelle de l’économie régionale. Un accent particulier a été mis sur le rapatriement et la domiciliation des revenus pétroliers, principal moteur de l’économie en Afrique centrale.
Un contexte régional sous pression
Les difficultés structurelles de la Cemac ne sont pas nouvelles. Une analyse conjointe du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale, publiée en avril 2024, avait déjà dressé un bilan sévère :
• Malgré des revenus pétroliers soutenus, la région n’a pas connu de progrès significatifs depuis trois décennies.
• L’économie reste peu diversifiée et dépendante du pétrole, avec un marché régional sous-exploité.
• Les inégalités de revenus persistent, malgré les politiques publiques engagées.
La croissance économique régionale, après avoir atteint 3,3 % en 2022, est tombée à 2,3 % en 2023. Les projections indiquent un léger rebond à 3,7 % en 2024, avant de redescendre à 3 % en 2025, principalement soutenu par les performances du Tchad et du Cameroun.
De son côté, l’inflation, estimée à 5,4 % en 2023, dépasse le seuil communautaire fixé, conséquence directe de la hausse des prix alimentaires en lien avec la guerre en Ukraine.
Des réformes structurelles encore trop lentes
Le président Paul Biya a exhorté les États membres à traduire leurs engagements en « actes concrets ». Si des progrès notables ont été réalisés depuis 2016, notamment dans la mise en œuvre des réformes structurelles, la lenteur de ces initiatives demeure un frein majeur au développement économique de la région.
Le communiqué final souligne que les efforts devront être soutenus par :
• Une meilleure gestion budgétaire ;
• Une mobilisation accrue des financements externes ;
• Une diversification de l’économie pour réduire la dépendance aux hydrocarbures.
Une feuille de route pour éviter la crise
À travers ce sommet, la Cemac affiche sa volonté de répondre collectivement aux défis économiques qui menacent la région. Les partenaires internationaux sont appelés à jouer un rôle clé dans le rapatriement des revenus pétroliers et le financement des réformes structurelles nécessaires.
Le discours de Paul Biya, marquant son retour sur la scène publique, s’inscrit dans une dynamique de mobilisation régionale face à un avenir incertain. La réussite de cette stratégie dépendra de l’engagement des États membres à traduire leurs ambitions en actions concrètes.